La BD d’aujourd’hui, c’est Torso… parce qu’avant d’etre responsable d’un tiers de la production Marvel, Brian Michael Bendis faisait beaucoup d’histoires policieres, et pas seulement le scénario… eh oui, il faisait aussi les dessins lui-même! Et il est pas totalement dénué de talent.
Co-écrit avec Marc Andreyko, Torso raconte l’histoire du “Cleveland Torso Murderer”, un tueur en série qui laisse les cadavres de ses victimes plus ou moins dans le même état que son nom l’indique, et ce dans les alentours de la ville dont vous pouvez vous douter aussi du nom… ville de laquelle Bendis est d’ailleurs originaire, et dans laquelle se déroulent la plupart des BDs qu’il écrit dans sa jeunesse, notamment Jinx et A.K.A. Goldfish (oh tiens, une série de Bendis qui commence par “A.K.A.” avec un personnage principal feminin! Ca me rappelle quelque chose…), que je recommande aussi, et qui suivent les déboires d’arnaqueurs, truants, et chasseurs de primes dans un style très “polar”.
D’ailleurs, si vous tracez la carrière de Bendis, il a une évolution très logique de la BD criminelle en noir et blanc vers les super-héros… Après ses aventures autour de Cleveland, il se fait embaucher pour ecrire Sam and Twitch, le spin-off policier où les super-héros gothiques de Spawn se baladent en arrière plan, puis l’excellent Powers, où les super-héros deviennent plus omniprésents, puis Daredevil (aussi très bon, on en a déjà parlé), et enfin l’univers Ultimate… à partir de là, les portes du Marvel Universe lui sont grand ouvertes. Mais bon, je m’égare, j’aime bien le monsieur, j’espère que vous me pardonnerez.
Revenons à nos cadavres mutilés. Est-ce que j’avais précisé que, histoire vraie, l’enquêteur à l’époque était le célèbre Eliot Ness? Oui? Non? Ben si; c’est lui.
Au milieu des années 30, dans une Amérique en déclin, la carrière d’Eliot Ness suit la même courbe. La gloire de ses victoires contre le crime organisé à Chicago est derrière lui, et sa vie personnelle et professionnelle commencent à battre de l’aile… et une investigation de tueur en série est bien la dernière chose dont il a besoin.
Le style de Bendis (on aime ou on aime pas) est bien visible dans Torso. Des dialogues interminables écrits à 100 à l’heure, des double-pages partout, des arrangements de cases en tableaux de 16 ou plus… et surtout une intrigue intéressante qui nous montre Eliot Ness d’une façon dont a très rarement l’habitude. Cette BD a valu à Bendis et Andreyko une bonne demi-douzaine de nominations à travers plusieurs pays et catégories, et a gagné un Eisner.
Torso (ainsi que les autres vieilles BDs que j’ai mentionné) sont dispo en faux sur Comixology et en vrai sur Amazon.
P.S: a une époque, David Fincher était censer bosser sur une adaptation en film de Torso, mais le projet fut éventuellement annulé. En fait, Bendis avait bossé pendant un moment sur des screenplays des 3 polars que j’ai mentionné, mais aucun n’a finalement été réalisé. Bendis a alors écrit et dessiné un BD semi-autobiographique à la fois rigolote et intéressante sur son “expérience Hollywoodienne” titrée Fortune and Glory.