Les spoilers, l'arnaque du siècle?

La frénésie Game of Thrones et Avengers : Endgame retombée, je me pose sincèrement la question : pourquoi cette virulence contre les spoilers, pourquoi l’omniprésence de cette alerte, des sites relatant l’épisode diffusé dans la nuit dès 7h du matin.

Il y a, outre l’engouement autour de ces œuvres (et d’autres) quelque chose de particulier, comme si le simple fait de savoir ou ne pas savoir nous classait dans des catégories sociales autour de la machine à café ou autour de la table lors du repas dominical chez mémé.

Alors que des études tendent à prouver (désolé de ne pas l’avoir retrouvé pour illustrer mon propos ici) que sur un panel de lecteur d’une oeuvre, ceux qui à qui on avait révélé la fin semblaient avoir plus apprécié l’oeuvre (supposément parce qu’ils ont pu se concentrer sur les personnages et les événements importants de l’intrigue et apprécier la construction narrative là où les autres l’ont subies en passant peut-être à côté d’éléments importants pour sa compréhension), on sent bien que le spoiler et tout ce qui s’y rattache est devenu crucial dans le plan marketing des œuvres des années 2010 (même Tarantino y va de son avertissement sur la fin de son dernier film présenté à Cannes).

Il ne s’agit pas ici de questionner la pertinence ou non des gens qui désirent ne pas se voir révéler les éléments importants d’une intrigue avant d’avoir vu une oeuvre (on pourrait leur renvoyer les policiers dont on connaît l’identité du tueur dès le début ou un film comme Titanic dont on connaît l’issue par cœur) mais bien de se demander pourquoi cette omniprésence dans les films/livres/séries aujourd’hui.
Je me souviens [mode vieux con engaged pour ceux qui n’avait pas encore saisi :stuck_out_tongue: ] des séries, des films, etc… . que j’ai vu dans les années 80-90 et même 2000, jamais il n’était question de cette crainte de se faire révéler des parties du film au détour d’une conversation (en écrivant ça, 2 gros contre-exemples me sautent à l’esprit : Usual Suspects et 6ème Sens, mais ils constituent des exceptions par rapport à aujourd’hui).

J’ai l’impression d’y voir encore (je vous l’avais dit que c’était un topic sonsporisé par le syndicat des vieux cons rageux) un effet néfaste des réseaux sociaux et de l’emballement dont ils sont capables pour tout et n’importe quoi. Et de ce tropisme, les responsables du marketing ont trouvé comment harponné et créer le buzz autour de points clés forts pour cristalliser un maximum de monde (il ne s’agit pas d’être en marge de la dernière série/whatever en vogue au risque de passer pour un marginal ou d’être un peu mis à l’écart.

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C’est vrai qu’on peut y voir maintenant une exploitation marketing du phénomène mais il faut aussi considérer que dans les années 80-90 voire début de 2000, internet était absent ou très peu répandu et il y avait donc beaucoup moins de risque de se faire spoiler justement.
Maintenant, il suffit d’ouvrir son fil twitter ou un site d’info pour risquer de recevoir ce type d’info non désirée par inadvertance, juste en survolant des yeux un tweet ou un titre…donc je ne pense pas que la comparaison avec “avant” soit valable sur ce sujet.

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Et surtout avant, tout le monde regardait les choses en même temps. Maintenant chacun peut regarder à son rythme. Et peut voir des choses par encore accessible gratuitement à la tv.

avant sans avoir internet, on mattait ce qui sortait à la tv, et on en parlait le lendemain.

Puis est arrivé la VHS, on pouvait décaler le visionnage, et je me rappelle très bien de gens disant à tous “je n’ai pas encore vu cet episode de x-files, ne me dites rien!”.

En gros plus la technologie a évoluée plus on a pu decaler les visionnage et plus la notion de spoiler a augmenté.

Ensuite pourquoi spoiler c’est criminel? Parce qu’un auteur s’est fait chier à créer une surprise dans une oeuvre, un dénouement, si quelqu’un te la dit, il a gaché un des effets voulus par l’auteur.

Apres chacun est plus ou moins sensible, voire pas du tout.

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et ca permet de faire le menage dans ses amis FB aussi :slight_smile:

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Sans avoir le courage de rentrer dans un long débat la dessus, juste mon ressenti personnel : je n’accorde aucune importance aux spoilers, je me spoile régulièrement plein de choses d’ailleurs, volontairement ou non.
Parce que pour moi ce qui est important ce n’est pas du tout l’événement, mais le cheminement, pas ce qui va se passer, mais pourquoi et comment.
Et c’est la que tu fais la différence entre une bonne écriture, et juste du shock value à base de cliffhangers gratuits, de résolutions péraves et de situations qui se passent uniquement pour surprendre le spectateur/lecteur à grands renforts de décisions débiles des personnages, comportements irrationnels ou à l’encontre de ce qui les définis.

Il ne faut pas oublier aussi que les séries avec des arcs par saisons / plusieurs saisons sont un phénomène récent, qui commence justement fin 90. Une des premières, ce fut Babylon 5, qui reste pour moi le top en série de SF, et qui m’a pourri une grande partie de la production qui a suivi, y compris actuelle. Chaque semaine, j’attendais impatiemment de voir ce qui allait se passer. Et pourtant, tout était clairement dit et annoncé. Dès le pilote, tu sais comment Londo et G’Kar vont finir, 20 ans plus tard. Quand on apprend l’origine de Valen, je suis resté en mode WTF total, c’était une résolution 2 saisons plus tard, et pourtant, on me l’aurait spoil, ça n’aurait rien changé à la valeur du truc parce que DES LE PILOTE, si tu fais gaffe, c’était dit, et c’était logique. L’avoir su m’aurait certes enlevé la surprise, mais pas le plaisir.

Depuis B5, Buffy, les Sopranos, The Shield…, tout le monde a rejoint le train du feuilletonant, mais j’ai l’impression que beaucoup oublient l’importance de faire, d’une part des épisodes qui se tiennent individuellement, et d’autre part une histoire cohérente. Tout ce qui compte c’est de surprendre le spectateur, de l’accrocher, de le faire binger la série ou revenir la semaine d’après. Et dans cet univers de l’accroche basée presque uniquement la dessus, si tu te fais gâcher ça par quelqu’un sur twitter ou facebook ou à la cafette, forcément tu le prends mal.

Avant d’avoir vu Endgame, je faisais la queue devant un concert et il y avait derrière moi un gars qui parlait très fort et qui était à deux doigts de balancer des spoils dessus. J’ai failli lui remémorer la scène des Simpsons où Homer sort de l’Empire Contre Attaque… Mais en y réfléchissant, est-ce que savoir qui est Vader gâche le film et ton plaisir devant ? Au final pour Endgame je me suis fait spoil la mort de Natasha mais ça n’a pas gâché pour autant la scène concernée, pareil.

Bref, fin des digressions. Oui, s’il n’y avait pas de consommation décalée des séries et qu’on était tous à la même enseigne sur les diffusions, il y aurait probablement moins de monde qui râle la dessus. Imaginez si c’était pareil pour le sport, et que ceux qui ne peuvent pas regarder un match gueulent parce qu’ils voient les résultats :joy:

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Le thread Game of Thrones c’est à côté.
:ninja:

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J’ai arrêté de regarder la série à la saison 3, ayant lu tous les bouquins j’avais vu venir. :grimacing:

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Comme le dit @funkylolo, c’est clairement lié globalement à l’accélération des canaux de communication (réseaux sociaux, mais aussi sites d’information qui ne sont clairement pas à négliger, vu la course frénétique au clic). Il y a 15 ans, c’était difficile de « spoiler » de manière massive. Aujourd’hui, avec l’accès facilité et immédiat à de grandes audiences, le phénomène a clairement pris de l’ampleur.

Je dirais que ça dépend de ce qui est divulgué. Ton exemple traite d’un « spoil » qui est finalement assez anecdotique dans l’intrigue générale du film, c’est plus une révélation au long cours qui, même en la connaissant, ne permet pas de déduire le reste de la trame. À titre personnel, ça m’aurait en revanche fait chier à l’époque de savoir comment se terminait le film. Au final, ça dépend de l’œuvre, certaines reposant en grande partie sur l’élément de surprise. Je n’irais pas jusqu’à dire que tous les « spoils » gâchent une œuvre, mais ça atténue clairement le plaisir de la découverte, qui est une partie non négligeable de l’expérience.

Mais ce n’est pas toujours le cas. Il y a d’excellentes oeuvres qui reposent intégralement sur ce concept de perversion des attentes et de révélation finale, ce n’est pas systématiquement de la « mauvaise écriture ».

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Tout à fait, mais même en ayant perdu l’effet « waouh » de la révélation, ce qui est bien entendu dommageable pour le plaisir que tu en retires, ces oeuvres se tiennent et tu peux les (re-)regarder et en profiter en connaissant ledit twist.
J’ai vu Usual Suspects en connaissant la fin, big deal. Après bon, comme je disais c’est une perception perso.

Après on est d’accord que le problème à l’heure actuelle est l’omniprésence et la rapidité des moyens de comm qui peuvent divulguer n’importe quoi en juste quelques secondes… Combien de temps peut-on reporter le visionnage ou la lecture d’une oeuvre, quel est le délai légal de spoil, le niveau légal ? :grin:
D’un autre côté, est-ce normal de hurler à la mort parce que tu as appris sans le vouloir quelque chose ? Je comprends qu’on veuille lutter contre un troll qui s’amuse à pourrir le plaisir des autres, mais quelqu’un qui refuse de regarder les bandes-annonces pour éviter le moindre minuscule spoil et qui gueule sur un chat pour un titre de news trop révélateur, on en revient à mon exemple du sport, il serait alors en droit de gueuler parce qu’il a vu le résultat du Lyon-PSG alors qu’il voulait le mater en décalé parce qu’il était coincé au boulot…

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Tout bêtement pour prévenir les lecteurs qui ne veulent pas savoir de quoi il en retourne avant d’avoir vu/lu par eux même ?

Franchement je trouve pas qu’il y ait vraiment de problèmes vis à vis des avertissements de spoil…

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Je n’ai rien contre l’avertissement en tant que tel, mais plutôt son omniprésence. Comme le disait @Faskil plus haut, c’est effectivement sûrement dû au fait qu’il est devenu très facile d’apprendre des choses même pas erreur tellement on est abreuvés d’informations. A titre personnel, et vu que je fait globalement parti de ceux qui s’en contrefichent d’apprendre des choses d’une oeuvre avant de l’avoir vue/lue (je fais partie de ceux qui lisent systématiquement la dernière page d’une livre avant de le commencer), je sature de ces avertissements permanents.

C’est devenu nécessaire et je n’ai pas de problème avec ça. C’est juste une mention indispensable à l’époque actuelle, et même dans les cas où elle ne me concerne pas (pour des papiers sur des séries que je ne suis pas, ou de films dont je me contrefous, mais dont j’aime néanmoins bien lire les critiques), ça ne me gène absolument pas. Ça permet de savoir avant la lecture dans quoi je m’engage.

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Perso chez moi c’est le contraire. Si je suis au courant d’un élément du film/série, ça va me pourrir le visionnage car je vais l’attendre à chaque scène et je vais me focaliser dessus en occultant le reste. Pour l’exemple de @MisterP, c’est typiquement ce qui m’aurait pourri la séance et sorti du film.

Même si les nouvelles séries jouent la dessus pour capt(iv)er les spectateurs, je pense que c’est aussi lié à la sensibilité de chacun sur la façon de découvrir une oeuvre. Un pote de fac refusait qu’on parle d’Urgences si il avait pas pu voir les épisodes la veille. Et bon, Urgences niveau intrigues ca se pose là (avec qui Carter va t’il coucher ?).

Anecdote nullos : y’a une 20aine d’années (hum hum ok plus proche de la 30aine mais c’est un détail), je matais pour la 1ere fois « Il était une fois dans l’Ouest » en famille. Mon frangin, dès le début commence à nous dire que c’est un film avec des flashback, genre la première scène avec Claudia Cardinale. Au final, il s’est trompé de film et on a rien compris au scénario puisqu’on l’a cru :joy:
Moralité : spoiler c’est nul, mais spoiler des conneries c’est pire

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J’ai une autre théorie qui pourrait expliquer cette mode qu’ont certaines personnes de divulgacher une oeuvre récente: la fierté. Je développe.

Internet existe depuis une grosse vingtaine d’année et si son utilisation commence a rentrer dans les mœurs, il est facile de constater que beaucoup de personnes ont du mal avec l’outil - qu’ils soient jeunes ou vieux d’ailleurs; la fameuse fracture numérique.

Il y a 20 ans, une personne qui a vu un film ou une série télé (généralement américaine) avant sa sortie dans l’hexagone était considère comme un héros: Il connait les bon plans du réseau des réseaux, il paye pas et il comprends l’anglais… WOA!
Alors OK, c’était peut être pas aussi magique sur les séries télé inconnues du grand public, mais sur certains blockbusters américains, ça pouvait faire son petit effet.
Les solutions légales n’existant pas, le grand public - au moins en partie - a appris a utiliser ces outils de téléchargements (puis de streaming) illégaux, leur permettant de faire partie du groupe des gens qui ont vu avant tout le monde.
A peut près au même moment, les réseaux sociaux se démocratisent et les réflexes “j’ai vu ça avant tout le monde” explosent avec. Et tout ce petit monde s’auto entretien avec le concept “je me suis fait divulgacher ce film par bidule, je vais lui pourrir cette série”

Perso, je suis pas vindicatif sur le sujet mais j’ai envie de découvrir l’oeuvre telle que souhaité par les auteurs, sans savoir ce qu’il va se passer. Et quand le spoil est volontaire, je suis pas content mais quand c’est involontaire, bah ça m’arrive aussi donc bon…

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Ton analyse se tient d’autant plus qu’à l’époque, notamment pour le cinéma, les sorties n’étaient pas internationales comme elles le sont aujourd’hui. Je me souviens avoir vu The Phantom Menace en août à Londres quand il ne sortait qu’en octobre en France (d’après ce que je lis il était même sorti en mai aux US et en juillet en Angleterre, aujourd’hui ça me paraît totalement intenable avec les réseaux sociaux et le piratage), bon OK il n’y avait pas de quoi pérorer mais à l’entrée dans la salle, j’ai ressenti une certaine fierté c’est vrai. C’est vite retombé après…

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C’est un club. On fait partie du club de ceux qui ont vue et qui savent… et donner son avis le plus rapidement possible c’est faire partie du club (et il y a 50 clubs par jours :grimacing:)

En même temps, si on prend de la distance, c’est un peu étrange comme peur. Je trouve notamment qu’il n’y a rien de plus énervant qu’une quatrième de couverture qui ne contient que vantardises et éloges sur la qualité du bouquin que j’ai dans les mains, sans même prendre la peine de m’expliquer le quoi du comment du quand.
Donc fondamentalement, quand on ne veut pas se faire divulgâcher une œuvre, c’est souvent une suite, ou au minimum quelque chose dont on a déjà la certitude qu’on va le voir/lire/… et donc par définition on sait déjà un (tout (petit)) peu ce qu’il va se passer dedans. On peut au moins soupçonner quelques grandes lignes et c’est encore plus vrai si le scénario n’est pas très complexe comme dans les films Marvel, où l’on voit assez vite où les choses vont aller (et où l’intérêt est plus dans le renouvellement constant de la formule, l’ambiance les images…). Mais ça peut-être tout aussi vrai à la fin d’une série comme Game of Thrones. À l’issue de la saison 7, il ne reste plus que deux gros fils d’intrigue encore en suspens, dont l’un a une issue presque certaine et l’autre ne fait guère plus de doutes que le résultat du second tour en 2017.

Mais ce divulgâchage qui fait si peur n’existe que parce que l’on connait déjà une bonne moitié de l’histoire. Je pourrais aller plus loin et demander la différence entre lire un bouquin et se le faire résumer, bref, est-ce que voir la série/lire le livre ce n’est pas se divulgâcher son intrigue ? :smiley:

Au fond, c’est peut-être ce qui provoque le plus de craintes : celle de voir réduire en fumée sa théorie favorite ou les attentes que l’on peut avoir, le tout sans avoir le contexte du livre ou du film autour. Cela fait que j’accroche pas mal à l’hypothèse de @LoneWolf sur la fierté. L’instantanéité d’internet amplifie le phénomène.

Ces avertissements ne me dérangent pas, c’est mieux comme dit @Faskil de savoir où on va. Mais cela peut devenir aussi assez complexe, car où s’arrête la frontière de la culture générale et où commence le divulgâchage ? C’est assez compliqué à définir pour une série comme Game of Thrones qui s’étale sur plusieurs années et ne parlons pas de Galactica des années 2000 qui est un remake d’une vieille série des années 1970…
Personnellement, j’essaie de faire preuve de bon sens. Je n’ai aucun scrupule à dire comme ça que la robe de Sansa à la fin de la série est argentée et noire. Et je me fiche bien de faire râler quelques extrémistes en la matière.

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Vous etes tous parti super loin …

En ce qui me concerne, j’ai horreur de me faire spoiler un truc simplement parce que j’apprécie de le découvrir en le regardant ou en le lisant, sans savoir ce qui m’attends.
C’est également pour cette raison que je déteste les bandes annonces qui sont un résumé du film, avec toutes les étapes et retournement de situation. Ou que je ne comprends pas les gens qui lisent le dernier chapitre d’un livre avant de lire le livre lui même.

Bref, me faire spoiler me gonfle parce que ça ruine la tension que l’auteur a mis dans son livre aux travers des rebondissements.

Et enfin, pourquoi spoiler les autres ? Pour moi, ca fait partie de la courtoisie, de ne pas gâcher le plaisir des autres.

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Voila même chose. Y’a pas besoin de rentrer dans des grandes discussions. J’ai pas attendu internet pour ne pas aimer qu’on me raconte un film avant que je le vois. Je n’aimais pas ça avant internet et je n’aime toujours pas ça.
Le spoil sur internet c’est avant tout une pratique des sales gosses sur les réseaux sociaux et des sites qui veulent faire du clic en parlant rapidement d’une oeuvre populaire. Et si on voit fleurir de plus en plus d’avertissements, c’est qu’il y a de plus de en plus de spoil et que les gens n’aiment pas ça en général. Et puis ceux qui s’en foutent, et bien c’est bon, ils s’en foutent.