Monter sa boite: oui, non, pourquoi, comment?

Ouaip, :clap::clap::clap::clap:

C’est vrai que le sujet des salaires est un des plus difficiles dans les entreprises, aussi bien les entreprises dites libérées (au sens de “Liberté & Cie.”), que dans les formats d’entreprises plus classiques où la transparence et les décisions collectives sont moins mises en avant.

La recherche du “bon” salaire à donner à ses employés tire des racines philosophiques et sociales très profondes : mérite, vertu, égalité, bonheur, parmi d’autres. Sans compter le cadre législatif, qui empêche de faire tout et n’importe quoi.

J’ai eu l’opportunité de parler sur un séminaire avec un patron d’une moyenne entreprise qu’il a voulu transformer en entreprise libérée, et ils ont mis en place un système où tout le monde sait exactement quelle est l’enveloppe d’augmentation pour l’équipe, et où un collège tournant de salariés est tiré au sort pour négocier les augmentations avec le manager.

En gros, tu es sur un plateau avec ~20 collègues. L’année N il y a K€ à distribuer, tout le monde le sait. Tout le monde sait aussi quels étaient les objectifs de chacun, et ses résultats. Parmi les 20 collègues, il y en a 4 qui sont tirés au sort pour négocier avec le responsable du plateau. Ils négocient avec le manager la répartition de l’enveloppe entre tous en fonction de ce qu’ils savent : les résultats (quantitatif), mais aussi l’engagement humain et pro de la personne, son attitude vis à vis de l’équipe, ce qu’elle fait en plus et que personne ne lui a demandé pour améliorer la vie de tout le monde etc. L’année suivante les quatre ne peuvent pas être tirés à nouveau, ce sont forcément 4 autres qui forment le collège, jusqu’à ce que tout le monde soit passé.

Le gros avantage de cette approche c’est bien sûr le jugement par les pairs, qui valorise la qualité du travail. Mais la limite c’est que ça n’est pas applicable à des gens qui ne travaillent pas vraiment ensemble (genre dans une SSII où les gens sont en régie chez des clients différents).

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Ouais, c’est vrai que ca marche/a marché tellement bien chez MS et Google l’evaluation par les pairs :frowning:

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+1. Le 360 c’est juste une atrocité absolue. Tu ne peux pas avoir une équipe soudée avec ce genre de méthodes.

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+1 aussi.

Au final tu restes au final dans le cadre d’une enveloppe de valeur arbitraire (même si probablement liée aux bénéfices/objectifs/ etc globaux), partagée de manière plus ou moins inégale au sein d’une équipe.
Sauf qu’en plus, tu déportes la responsabilité de ce partage habituellement assumée par une couche hiérarchique supérieure, vers une sous partie de l’équipe concernée.
Dès lors, tout sentiment d’injustice dans la répartition va cultiver des animosités entre membres de l’équipe, et participer à sa dissolution.

Cette méthode encourage :

  • le copinage: c’est celui qui s’entend le mieux avec les 4 décisionnaires qui a les meilleures chances d’augmentation
  • l’exclusion: bon lui qu’on lui donne un peu ou rien du tout de toute façon il va nous en vouloir, autant que ce soit rien du tout
  • le ressentiment

Et celui qui se sera senti floué ne va pas relativiser en se disant qu’avec un peu de chance, dans 5 ans ce sera à son tour de décider de la répartition.

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C’est donc parfait pour un patron moyen dans une boite moyenne :smiley:

Je comprends vos critiques. Je me demande juste si on parle du même ordre de grandeur. Une méthode adaptée à une boîte de moins de 50 salariés peut ne pas se transposer à une grosse structure comme MS ou Google. Mais là on parlait plutôt d’un studio de JV.

Les critiques de @Rabban aussi sont intéressantes. Entre le copinage à l’ancienne avec le manager en mode lèche-cul, et le réseautage avec 4 employés (tirés au sort, donc en pratique il faut être aimé d’un peu tout le monde), je ne vois pas ça comme un argument en défaveur de la méthode collégiale. Ca reste une faille, mais moins pernicieuse que quand le chef décide seul. Idem pour l’exclusion ou le ressentiment. Là encore je ne suis pas sûr de voir en quoi c’est pire qu’avant. Au contraire même. Si un employé est exclu, c’est vis-à-vis d’un groupe auprès duquel il a les moyens de s’expliquer tous les jours, et pas d’un manager qui ne le connaît peut-être même pas. Le but n’est pas de juger le système dans l’absolu, et d’en chercher un sans biais, c’est impossible. Le but c’est de choisir les biais les plus acceptables. Et souvent, le jugement par les pairs est mieux accepté qu’un jugement hiérarchique.

Un autre point, c’est que tu supposes que le biais collectif est en faveur des beaux-parleurs et des extravertis (je paraphrase, mais désolé si je trahis ton idée, dis-le moi). Là où le biais d’un manager serait moindre, car le manager ne jugerait que sur les résultats qu’il observe. Mais en pratique est-ce vrai ? Est-ce qu’un mec seul, d’en haut, est vraiment moins biaisé dans son opinion sur ses subordonnés ? Ou est-ce qu’au contraire les biais individuels peuvent être réduits dans un collège de personnes qui peuvent tous influencer la décision en discutant ? Perso je pense que c’est le collège le moins biaisé. Les biais vont avoir tendance à s’annuler dans un collège de personnes tirées au hasard, et qu’on encourage à évaluer les autres comme on les évaluera eux-mêmes.

Sur le theme du salariat, on peut aimer ou pas la fonction publique, la notion de grades dans la fonction publique etabli une grille de salaires connue de tous. Et je trouve ca bien. Enfin bon bref, je diverge.

Si je devais définir la manière de gérer les augmentations au sein d’une équipe, ma préférence irait à l’égalité entre tout le monde (en valeur ou en pourcentage du salaire courant, peu importe).

Les objectifs sont collectifs, et seul le travail d’équipe et l’avancement des objectifs communs sont récompensés (les objectifs individuels étant souvent biaisables en allant à l’encontre du bien commun; par exemple en incitant à ne pas aider un collègue pour ne pas voir diminuer ses performances individuelles)

Mais c’est vrai que le sujet est complexe, et que tout mode de fonctionnement possède ses propres problèmes (ici les freeloaders, qui devront être gérés autrement)

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Le seul inconvénient des objectifs purement collectif et de la paye égale, c’est que ça ne peut marcher quand tant que tu es bon sur le recrutement et que tu es encore à une taille ou chacun peut se sentir impliqué dans les objectifs.

Sinon tu te retrouves avec l’effet inverse “boarf, ça sert à rien que je me casse le cul, de toute façon il y a machin et bidule qui branlent rien et qui auront pareil”.

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En fait, c’est plutôt démotivant car les bons comme les mauvais éléments sont traités pareil. Et on vire personne dans la fonction publique même les très mauvais

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Attention au contexte hein: j’ai pas parle de resultat ou de performance, j’ai parle de la notion de grilles de salaire. C’est une donnee commune, accessible a tous et toutes. C’est une autre facon de penser le salariat (parce que concretement, le coup du secret du salaire dans la relation entreprise/salarie, c’est rarement a l’avantage des salaries)

(mais encore une fois, pas le sujet)

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Je suis assez fan de la Fonction Publique française, que je trouve relativement bien foutue pour une organisation (ou plutôt des organisations) de si grande taille. Fils de fonctionnaire (agent comptable dans l’EN en IdF, après avoir baroudé autour du globe autant qu’il pouvait avec des mutations), j’ai vu comment ça fonctionne et à part quelques brebis galeuses là où mon père bossait c’était très égalitaire tout en encourageant à passer des concours et donc à se dépasser.

Mais pour moins de 50 personnes, dans un domaine technique pointu comme le JV, je vois mal l’égalité marcher. Déjà pour clarifier quand je parle de salaire je devrais plutôt parler de rémunération (salaire + bonus)

Supposons qu’on choisisse l’égalité de rémunération, comment on justifie qu’un junior qui est encore en train d’apprendre soit payé comme un vieux briscard qui valorise toutes les heures qu’il a passé à plonger dans le code et a une bien meilleure productivité pour l’entreprise ? Comment on justifie qu’un modérateur de forum soit aussi bien payé qu’un développeur alors que le second est beaucoup plus dur à trouver sur le marché et qu’il peut se voir offrir de très bons salaires ailleurs ?

Si on parle d’égalité des augmentations, en valeur absolue, pourquoi pas. Mais comment différencier quelqu’un qui sur une année s’investit beaucoup plus qu’un autre à poste égal ? Quelqu’un qui a pris des initiatives, qui a poussé et porté des sujets, par rapport à quelqu’un qui a fait strictement ce qu’on lui demande, mais sans plus ? Ou même quelqu’un qui fait strictement le même travail que les autres mais qui rend le cadre de travail plus sympa, en s’occupant du bien-être des autres et en s’investissant dans la vie de l’entreprise (il s’occupe des plantes vertes, il organise les apéro, il fait une newsletter sur la vie de la boîte…) ?

Et si on parle en pourcentage, du coup c’est très injuste pour ceux dont la rémunération était moindre, ça creuse automatiquement l’écart…

Et puis on en revient à la question de la décision unilatérale vs. la décision collégiale. Avec un mode collégial, la décision d’où placer le curseur est plus facile à accepter par tout le monde. Par exemple 80% de l’enveloppe utilisée pour des augmentations égalitaires, et 20% pour des bonus sur une année où il y avait peu d’objectifs exceptionnels, ou au contraire 50/50 une année cruciale pour l’entreprise où il fallait se lever les manches et où les gens savent qu’il faut être reconnaissant envers quelques personnes clés qui ont porté l’équipe.

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la grosse faille de ce systeme c’est que ca implique des gens d’avoir une autocritique sur la qualité de leur travail et son impact . Or la grille de lecture est personnelle à chacun . C’est juste une illusion et une machine à ressentiment .

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En plus des problemes déjà soulevé, le problème c’est que cela déporte la responsabilité : c’est le boulot du manager (et de sa hiérarchie) de décider. Il est payé pour, déporté les décisions difficiles sur ces n-1 tout en gardant son salaire, je trouve cela un peu facile.

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Vous mélangez tous les mecs, le 360 et le stack rank sur une courbe qui est forcé meme dans un nombre petit d’employés, c’est pas du tout la meme chose… Le review des pairs > le boss qui decide tout au favoritisme, y a meme pas photo, et cette partie marche super bien chez Google ou MS (ou les autres). Apres comme partout les gens qui sont mauvais dans leur job, a 80%, jamais ils vont reconnaitre qu’ils sont mauvais a leur job, ils méritent tous une augmentation et c’est “trop injuste” quand ils se font virer… et ils chient sur tout ce qui bouge en public la ou le manager/la boite ne peut jamais répondre (parce que c’est contre productif de chier sur ses employés meme ceux qui se font virer).

Mouaif. Autant je peux comprendre les concours à la fin des études, autant j’ai toujours trouvé que c’est un non-sens cette promotion scolaire pour le reste de la vie professionnelle (sauf les professions réglementées). Oui éventuellement aux SCOP par exemple, valable que dans les toutes petites sociétés, mais par pitié n’instituont pas ce truc des concours dans le privé qui ne sert qu’à la fonction publique soi disant pour éviter le copinage.

On utilise aussi pas mal de concours dans le privé. Un grand cabinet d’audit parisien le fait pour gérer les promotions internes :wink:

Et justement ça n’évite en rien le copinage puisque c’est généralement en 2 parties, un écrit et un oral et que ce dernier se fait largement à la tête du candidat.

ou pas, dans la territoriale, le concours donne le grade mais pas le poste, a toi après de trouver une job.
Et meme, le copinage a un oral, faut vraiment avoir du bol pour tomber sur des jurés que tu connais.

A l’université ils ont poussé encore plus loin, le comité de sélection est composé d’interne et d’externe (50/50) et quand c’est fait en respectant les règles, c’est même a a bulletin secret.