Les vieux n’ont plus leur place dans ce monde. Non mais c’est clair. Ils sont vieux. Moustic nous faisait croire il y a quelques années qu’ils étaient organisés. Mais c’est totalement faux. Ils ne le sont pas. C’est complètement mal vu. Ils sont dépassés. Ils n’y arrivent plus, ils sont en décalage avec le monde. Posés, leurs vieilles fesses plates sur une chaise dure en bois, les mains cerclant une tasse de café, un verre d’alcool de temps en temps, ils se demandent bien bas : mais qu’est ce que c’est que ce monde là? On se le demande aussi hein, ils n’ont pas le monopole de l’existentialisme. Moi aussi ça m’arrive, tiens voilà, je vous le demande ma bonne dame mon bon geek. Qu’est ce que c’est que ce monde?
Je vais vous le dire moi, c’est un monde absurde, mortel, violent et, bien évidemment, le billet, la pièce de monnaie, la valeur des choses, y porte une place totalitaire, de dictateur. Dicté par son odeur et son pouvoir l’Homme se violente. C’est un vieil adage.
[center][/center]
No Country For Old Men, ça doit être un truc comme le douzième film des frères Coen, deux frangins qui nous balancent du bon (Fargo, O’Brother) et du pas bon (The Big Lebowski) depuis maintenant 24 ans. Aujourd’hui, avec ce film, ils sont nombreux à se tâter une couille puis l’autre, avant de se décider. No Country For Old Men serait-il le meilleur film des frères Cohen? Et bien moi je vous le dis, c’est non. C’est un bon film. J’hésite à dire très bon et finalement en y réfléchissant je n’hésite pas tant que ça. C’est bon. Point.
Le film commence sur le désert. Une voix off, celle du shériff Tommy Lee Jones, nous explique d’une façon bien désabusé que la violence est le sang de la région, son essence intemporelle (le personnage campera d’ailleurs un rôle de narrateur, débutant et terminant le film sur une note de mélancolie, le traversant avec un recul constant). Le désert américain, les espaces naturels secs, les plans sur les bottes poussiéreuses et les sabots des chevaux. Je me faisais la réflexion entouré de mes camarades cinéphiles, après la projection, en face du cinéma une cigarette dans la bouche, “merde qu’est ce qu’on se régale avec ces paysages quand même”. Into The Wild, Shotgun Stories et maintenant No Country For Old Men. L’amérique est belle, le potentiel naturel est jouissif et les films récemment projetés me régalent à ce niveau là. Visuellement et dans un certains sens, le film me fait penser à The Three Burials of Melquiades Estrada, même région, la proximité de la frontière mexicaine, la rivière pauvre et sinueuse perdue dans le désert, le shérif à cheval, la traque et la mort (Tommy Lee Jones semble d’ailleurs avoir enchaîné les deux films et par enchaîné j’entends tourné les deux films dans la même journée).
[center][/center]
Llewelyn est un Colonel 'Nam, à la retraite, il passe le temps en chassant dans le désert (sérieux, les deux films ont été tourné dans la même journée). Un jour, suivant la trace de sang d’une proie touchée mais pas abattue, Llewelyn tombe sur un carnage, des douilles partout, un pick-up plein de drogue et, un peu plus loin, sous un arbre, un bon gros paquet de fric. Là forcément, on hésite pas. On prend l’argent, sans évidemment oublier toutes les conséquences que cela peut avoir. Drogue, argent, beaucoup d’argent ramène souvent à sang, beaucoup de sang, etc. Llewelyn en a marre de sa caravane à la con et, malgré une certaine nonchalance, il semble vouloir sortir sa jolie femme de cette crasse, alors il ne réfléchit pas trop longtemps et s’empare de l’argent. Gentlemen, démarrez vos gros engins, la poursuite peut commencer.
Les trois premier quarts d’heure du film m’ont largement conquis, la recette Coen est bien là, tension terrible, comique absurde et violence contemplative. Les temps d’attente crispants s’enchaînent parfaitement avec les moments emportés où la violence crève l’écran. On jubile, on est tendu, on rigole et l’on s’exclame. Javier Bardem dans les bottes du psychopathe à la coupe de playmobil est simplement hallucinant. Vos amis qui auront vu le film, vous l’auront déjà expliqué, dans un souffle. Rarement vu un fou pareil au cinéma. Une terreur froide et presque cartoonesque à l’arsenal délirant. Le jeu du chat et de la souris, qui se voit agrémenté d’un autre joueur au cours du film, fonctionne à merveille.
[center][/center]
Le dernier quart d’heure, qui tombe comme la mort, est lui très lent, contraste beaucoup avec le reste du film. Je me suis un peu demandé ce qu’ils étaient entrain de foutre et il faut bien l’avouer, je me suis senti trahi. La transition est brutale et la remise en question du shériff assez lourde, à mon avis. Je m’interroge, est-ce que ce personnage incroyable de tueur à gage, avec cette folle chasse à l’homme, ne détourne-t-il pas trop le regard du spectateur? On sent le message, il y a un fond que l’on discerne, que l’on arrive à sentir et pointer du doigt mais qui à mon sens aura été assez mal présenté.
Pour résumer comme un mal propre, les personnages valent le détour, il faut voir ce fou dégoupiller les serrures par dizaines, avec sa bouteille, comme une quête dont lui seul connaît le sens, il faut vivre cette tension et ce suspense, il faut voir Tommy Lee Jones en shériff parce que c’est ce qu’il fait de mieux. Mais la fin, je ne comprends pas. Et puis on voit pas un nichon. (?!?)
[center]
- Howdy, what’s this about?
- Step out of the car please, sir.
- What is it?
- I need you to step out of the car, sir.
- What is that for?
- Would you hold still please, sir.[/center]