[CINÉ]Syriana

… some good communication…" (Keziah Jones - Beautiful Emily)

C’est extremement rare de pouvoir aller au ciné “au frais de la princesse” (de l’associatin ciné de mon IEP en l’occurence) donc jeudi dernier lorsqu’on m’a porposé une place pour l’avant première de Syriana (suivi d’une conférence de mon prof de civi américaine, la classe!). J’avais vraiment envie de le voir ce film et pas seulement parce que j’aime beaucoup Clooney et Damon mais aussi parce que selon la campagne de promo l’histoire était largement basée sur des faits réels.

[SPOILERS]

Seulement, après la projection (2H04) je dois avouer que je suis sorti un peu débousolé: le scénario s’attarde sur quatre personnages et si deux des protagonistes poursuivent des parcours assez clair (un jeune kamikase pakistanais et Damon, analyste financier qui devient conseiller d’un cheick réformiste) l’autre moitié (Wright et Clooney) poursuivent des desseins plus obscurs. Peut être y a-t-il ici des gens qui ont lu le livre et qui pourrait m’éclairer:
-A quelle organisation appartient Mussawi? Il est d’abord engagé par Clooney pour descendre le cheick réformiste (d’après ce que j’ai compris) mais se révèle fourbe et le torture. Vengeance du Hezbollah? Coup monté par la CIA pour se débarassr d’un agent génant?

-Quelle est la magouille avec Benett Holiday? Quelles informations recherche-t-il dans l’espèce de cave? En gros qu’est-ce qu’il essai de prouver? La majeure partie de ce qui tourne autour de ce personnage m’a échappé…

[/SPOILERS]

Pour ceux qui n’ont pas vu le film et qui se hasarde sur ce fil je leur conseil de bien se documenter avant d’y aller. Sans lire le bouquin essayer d’étudier un peu les faits réels, ça rendra probablement le film moins opaque. Parce que oui, c’est loin d’être grand public, au même titre que Good Night and Good Luck (de Clooney) c’est du film politique intelligent qui ne prend pas le spectateur par la main. Sur ce coup là Section 8 (la boîte de prod’ de Soderberg et Clooney) semble bien parti pour élever le niveau à Hollywood. Un succès au box office au bout? J’en doute malheureusement (en France comme aux E.U) tant Syriana apparaît trop “intellectuel”.

C’est dommage, ouais, pas tant parce que le film est « intellectuel », mais parce qu’il manque de rythme et de « patate » (ouais, j’adore les guillemets). Gaghan a essayé d’élever un peu le niveau par rapport à Traffic mais le sujet est épineux et c’est effectivement une gageure de retracer tout le background nécessaire dans un film de deux heures. Pour Traffic, le problème se posait moins car le contexte est archi-connu et le scénariste peut se concentrer sur d’autres aspects que la leçon de géopolitique sur grand écran. Je l’ai vu il y a quelques temps mais, comme toi, certains pans du scénar m’ont laissé perplexe, du coup je sens que je vais aller le revoir.
En tout cas, ça serait con que Clooney et Soderbergh arrêtent de produire des films comme ça en 2007, date à laquelle ils ont prévu de dissoudre Section 8.

Ah oui clairement, y a un problème de découpage du scénario. Par exemple l’histoire du kamikaze, si elle reste intéressante, n’a quasiment aucun lien avec la trame originale. Autrement dit Gaghan aurait peut-être pu s’en passer pour se concentrer sur l’intrigue principale… Tiens j’avais adoré Traffic au fait (casting de ouf pour ne rien gacher! raaaah, Benicio Del Toro…)

SPOILER (sur tout le post)

A priori ce n’est pas le hezbollah puisque clooney est « sauvé » de la mort par Said Hossein Hashimi, la personne qu’il rencontre en arrivant à Beyrouth et à qui il demande l’accord du hezbollah justement pour mener son opération. N’ayant pas lu le livre je ne peux que supposer que Mussawi travaille pour le prince Nasir, et que Bob a vraiment pas de bol de lui demander de liquider ce mec en question (entre parenthèses la scène de torture… brrr).

Pour la trame avec le jeune kamikaze (pas facile de se rappeler les noms, même imdb n’aide pas beaucoup), elle doit être raccrochée au reste de l’histoire par le biais de « l’arabe aux yeux bleus » que connait Bob visiblement, puisque Fred (son « pote » de la CIA qui ordonne le tir par satellite) mentionne son nom avant que Bob ne reparte pour sauver le prince Nasir. Et cet « arabe aux yeux bleus » est justement le recruteur des jeunes pakis pour les missions suicides. Voilà, my 2 cents, même si dans le film le lien est plus que tenu entre ces protagonistes.

Enfin pour ce qui concerne la multiplication des productions à caractère politique dernièrement à hollywood, j’aimerais souligner que même si section 8 n’a pas vocation à durer éternellement, la boîte de prod « Participant » est en train de jouer un grand rôle dans ce phénomène, et apparemment vu le certain engouement du public (au moins européen) pour le genre elle a de beaux jours devant elle (lire à ce sujet l’excellent article de Première de ce mois-ci).

PS je trouve l’acteur jouant le prince Nasir très, très charismatique. ImDB m’indique qu’il s’agit d’Alexander Siddig et qu’il a joué dans pas mal de star trek… je le surveille :stuck_out_tongue:

la partie kamikaze, elle est surtout à rapprocher du fonctionnement des petroliers dans le golfe : ils exploitent des populations pour exploiter le petrole et non seulement il ne leur redistribue quasiement rien mais les considèrent rien de plus que de la merde, ce qui a une conséquence importante : la pauvreté, la précarité, ect … ce qui est le meilleur chemin vers la jalousie, la colère, ect …
resultat les pétroliers laissent crevé des populations qui sont du pain beni pour les islamistes radicaux dans leur besoin de main d’oeuvre desespéré.
C’est d’alleurs bien mis en scène, d’un coté quand ils bossent et qu’ils gagnent pourtant de l’argent, ils vivent dans des conditions miserables, et de l’autre quand ils ne font rien que étudier l’islam, ils sont fringué, nourris, “eduqué”, ect …
clair, concis, efficace : les petroliers americains sont en partie responsables de ce que leur gouvernement se prend dans la gueule. Evident certe, mais superbement illustré.

En ce qui concerne le gars au yeux bleus, je sais pas si j’ai revé, mais je crois qu’'ils l’apellent l’egytien aux yeux bleus, que Bob ne connait pas avant le coup du missile en debut de film, par contre ses boss sont surement au fait de son existence.

En tout cas sublime film pour ma part, ou on voit très bien l’histoire à différents niveaux, c’est ultra cohérent, complexe et probablement très réaliste ; dommage qu’il manque je dernier echelon : l’echelon executif (président des us, gouvernements, ect …)

[quote=“JORYS, post:5, topic: 27634”]C’est d’alleurs bien mis en scène, d’un coté quand ils bossent et qu’ils gagnent pourtant de l’argent, ils vivent dans des conditions miserables, et de l’autre quand ils ne font rien que étudier l’islam, ils sont fringué, nourris, “eduqué”, ect …
clair, concis, efficace : les petroliers americains sont en partie responsables de ce que leur gouvernement se prend dans la gueule. Evident certe, mais superbement illustré.[/quote]

Bien vu mais ça reste un extra qui alourdi un peu le film à mon avis. Sur les kamikazes, voir l’excelent Paradis Now de Hanny Abu-assad.
Je crois que je vais essayer de choper un bouquin de Robert Baer pour y voir plus clair. Ce type a l’air d’écrire des choses intéressantes sur le sujet.

Bon, j’ai trouvé le film GENIAL (oui, en majuscule même), ce pour plusieurs raisons. Les acteurs, la musique, la réalisation, la photo, les acteurs… Pleins de raisons.
Le scénario est complexe, certes, mais perso j’adore ça (au moins, je ne m’ennuie pas). Le passage entre les différentes histoires donne un rythme à l’ensemble, une réelle dynamique.
De par ce rythme sans temps mort et ce scénario complexe, le premier mot qui me vient à l’esprit c’est : éprouvant. Le film est éprouvant, on en sort lessivé. D’une, parce qu’il est extrêmement prenant, et de deux, parce qu’il fait réaliser à quel point le monde peut pencher du côté obscur.

Maintenant, pour répondre aux précédentes critiques :

Autant je trouve que pour Good Night And Good Luck, se documenter est essentiel (ou au moins avoir des bases à propos de l’époque du McCarthysme), autant je trouve que le fond est assez bien expliqué est nettement mis en place pour se passer du bouquin avant d’aller le voir. Le lire après, par contre, pourquoi pas.

Justement, je trouve ça très intelligent. ça permet de ne pas tomber dans une sorte d’anti-américanisme. On sent très bien que derrière Clooney, la CIA est là (et donc le gouvernement), que derrière Wright et les grands groupes pétroliers, ce sont les intérêts du pays qui priment. Alors pourquoi être plus explicite ? Qui plus est, je pense que le film souhaite garder une ligne directrice assez réaliste, et impliquer des personnes du gouvernement plus haut placée sans connaître leurs réels agissements tiendraient trop de l’extrapolation. Ce serait mal venu.

Un petit spoiler spécial Garuffo

[spoiler]- Mussawi n’appartient ni à la CIA, ni au Hezbollah. C’est un contact au proche orient de la CIA, c’est pourquoi Clooney le contacte. Il est au moment des faits hébergé par le Hezbollah, mais n’appartient pas à leur groupe. Il a choisi de rompre ses liens avec la CIA, ce pourquoi il torture Clooney, mais quant à l’organisation pour laquelle il travaille vraiment… Pas pour le Prince à mon avis. Il ferait plutôt parti du même groupe que celui des kamikazes.

  • Benett Holiday doit prouver que la loi concernant la libre concurrence et interdisant la corruption a été respectée. Comme c’est une petite société qui a eu le contrat au proche orient, ça paraît louche. Et effectivement, il y a eu malversation. Mais comme c’est dans l’intérêt du pays (il y a des sénateurs qui lui mettent la pression), dans l’intérêt de son cabinet (son boss et l’histoire des moutons et des lions) et dans son propre intérêt (promotion, tout ça) que l’entreprise garde le contrat, il ne dénonce pas tout. Il se contente de dénoncer les personnes directement reliées à la corruption, en admettant le fait que les patrons de l’entreprise n’étaient pas au courant des actions de leurs relations. [/spoiler]

Ah, et avec le recul, le seul truc énervant du film, c’est cette façon dont, à chaque fois, il met le personnage en danger, nous fait croire qu’il va être sauver jusqu’au dernier moment et… non, il meurt. Une fois, d’accord, mais trois ou quatre fois dans le même film… Mais je ne considère de toute façon pas ça comme un défaut.

Je viens de rentrer du ciné et je sors enchanté de ce film. En relisant ce thread, je comprends mieux certaines zones d’ombres du scénario (l’objectif de Bennet Holiday). Il est vraiment fort, ce Clooney : le chemin est long depuis Urgences !