Pré-introduction
Je sais que ce n’est pas vraiment un sujet d’informatique ou d’un centre d’intérêt habituel de geek, mais j’imagine que certains geeks seront intéressés par le côté « particularité scientifique » de la chose. Pour ma part, cela faisait un moment que je voulais en faire, mais l’impossibilité de trouver le matos et le prix des lasers à l’époque m’avaient pas mal refroidi - aujourd’hui avec Internet, les choses ont un peu changé, même si ça reste un loisir cher (voir le paragraphe sur le matos).
Qu’est ce que l’holographie ?
Avant de rentrer dans le vif du sujet, il convient de savoir de quoi on parle. Donc l’holographie c’est un peu comme la photographie (argentique) sauf qu’on produit des images en 3D grâce aux interférences d’une lumière cohérente sur une plaque photosensible. On trouve des ‹ hologrammes › (pressés dans de l’alu, pas argentiques, donc) sur des cartes bancaires, des tickets de concert, par exemple.
Il y a un article chez Wikipedia qui donne les détails croustillants.
Combien ça coûte / De quoi ai-je besoin ?
C’est ici que les choses intéressantes commencent. Le coût est très variable en fonction du résultat souhaité et du niveau de bidouillage de l’amateur, mais le minimum sera :[ul]
[li] un laser b[/b][/li][li] une lentille pour séparer le faisceau b[/b][/li][li] quelques plaques holographiques (voir liste de fournisseurs à la fin de l’article)[/li][li] un kit de développement holographique (voir liste de fournisseurs à la fin de l’article)[/li][li] une lampe verte pour voir dans le noir b[/b][/li][li] de l’eau déminéralisée, des petits bacs, et diverses autres choses[/li][/ul]Notes :
b[/b] Avec les énormes progrès des lasers à semi-conducteur, il est souvent possible d’utiliser un simple pointeur de poche comme source de lumière cohérente.
b[/b] Idéalement il faut une lentille concave ‹ parfaite ›, mais une loupe propre (sans rayure) pourrait éventuellement faire l’affaire
b[/b] Les plaques holographiques sont sensibles à la lumière rouge et moins sensibles à la lumière verte : il convient donc d’employer une source de lumière verte pendant la prise et développement pour ne pas exposer ses plaques.
Il existe aussi des kits holographiques ‹ prêts à l’emploi › pour réduire un peu les coûts et qui contiennent laser, optiques, plaques, kit de développement, ça peut être une bonne solution (voir liste de fournisseurs).
Comme je suis un gros malade, voici ce que j’ai pris :[ul]
[li] un laser HeNe (à gaz) sur eBay b[/b][/li][li] une lentille concave, un séparateur de faisceaux, un miroir de surface b[/b][/li][li] du film holographique + kit de développement[/li][li] 4L d’eau déminéralisée, des petits bacs[/li][li] des plaques en acier, des aimants, du verre 2mm, une découpe verre, de la colle (voir la suite)[/li][/ul]Notes :
b[/b] Neuf, les lasers HeNe coûtent des fortunes, mais on en trouve d’occasion à prix beaucoup plus raisonnable
b[/b] En optique de précision, il faut utiliser des miroirs avec la surface réfléchissante devant (le verre n’est pas dans le chemin lumineux pour éviter des reflets)
Au final, le prix est variable selon ce qu’on a déjà et ce qu’on veut faire, mais il faut compter :[ul]
[li] 70 euros si on ne prend que les plaques + kit dév[/li][li] 110 euros pour un kit[/li][li] >200 euros pour un peu de matos[/li][/ul]Le laser
En holographie ce n’est pas la directivité du faisceau qui nous intéresse mais la nature cohérente de sa lumière. Une lumière cohérente est une lumière monochromatique qui permet d’observer des effets d’interférence quand, par exemple, une lumière directe et une lumière réfléchie arrivent sur une même surface.
Voir le paragraphe sur l’interféromètre et l’article Wikipedia sur les lasers.
Plaques / Film : c’est quoi ce truc ?
L’idée étant d’enregistrer une scène 3D, il faut un support : le film holographique sensible à la lumière rouge (pour les lasers courants). Pendant la prise, le support doit être parfaitement rigide, si ça bouge, c’est perdu. Les ‹ plaques › ont l’avantage d’avoir la couche photosensible déposée directement sur un verre, c’est donc facile à tenir à l’aide de quelques pinces. Le film est, comme son nom l’indique, un film : il faut obligatoirement le fixer en sandwich entre 2 plaques de verre. Il faut aussi déposer sur le verre un liquide dont l’indice de réfraction est proche de celui du verre avant de déposer le film, pour éviter un changement de milieu supplémentaire (verre → air → film), tout ça dans le noir. Naturellement, les plaques sont beaucoup plus chères que le film : la facilité a un coût.
Autre avantage des plaques de verre : les films plastique ont tendance à s’ « enrouler » ce qui rend difficile la visualisation (plus d’informations sur la visualisation de hologrammes plus bas).
Développer ses hologrammes
Contrairement à la photographie classique où l’amateur choisit de développer lui-même ses photos ou de faire développer par un labo, l’amateur en holographie développe obligatoirement lui-même, c’est obligé. Plusieurs façons de faire existent, mais en général le plus simple c’est d’acheter un kit qui contient tous les produits chimiques dans des sachets pré mesurés ; il suffit alors de mélanger à de l’eau déminéralisée en suivant les instructions.
Les produits étant toxiques, il convient de se protéger les mains et de prendre les précautions d’usage (comme en cours de chimie B) ).
Réaliser des supports optiques
Je compléterai cette partie si cela intéresse quelqu’un, sinon, achetez le kit !
L’interféromètre de Michelson (optionnel)
En holographie, un interféromètre sert notamment à s’assurer que son banc est parfaitement stable et qu’il est possible de réaliser des hologrammes dans de bonnes conditions. En effet, si le sol ou un équipement optique venait à bouger (attention, on parle en fractions de millimètre là) pendant la prise, aucune interférence ne sera enregistrée sur la plaque. Il s’agit donc d’un élément clef.
Quand l’interféromètre est correctement réalisé, on obtient une projection (sur une feuille de papier, par exemple) qui présente des raies, par exemple :
Pour plus de détails, voir l’article sur Wikipidia.
C’est parti !
Normalement à ce stade, vous avez reçu les fournitures (laser, film, produits, optique…) et vérifié la stabilité de la surface de travail à l’aide de l’interféromètre de Michelson (optionnel, mais ça reste une bonne idée). En effet, si le film/la plaque ou l’objet devait bouger, même 1/100 de mm, pendant la prise vous n’aurez pas le résultat souhaité. De plus, un hologramme loupé, ce n’est pas comme une photo loupée : dans le cas de l’hologramme, il y a de très fortes chances que rien ne s’affiche du tout si c’est pas fait correctement.
Avant de passer dans le vif du sujet, il faut choisir un objet à holographier. La taille et la position de l’objet vont varier en fonction du type de l’hologramme (par réflexion ou transmission), mais globalement il faut prendre un objet solide (qui ne bougera pas pendant la prise) et brillant/lumineux (un objet métallique fera parfaitement l’affaire).
Ensuite, un temps d’exposition de 10 à 30 secondes devrait donner des résultats corrects que ce soit en holographie par réflexion ou par transmission.
Hologramme par réflexion
L’avantage de l’hologramme par réflexion c’est qu’il est assez facile à réaliser (un seul faisceau) et sera visible à la lumière blanche normale. L’inconvénient est que le résultat peut être difficile à voir, mais c’est plutôt impressionnant quand on a compris comment. Pour la petite histoire, j’avais juste fini de développer mon premier hologramme, je laisse sécher (parce qu’on ne verra strictement rien tant que c’est pas 100% sec), et là je regarde, et je ne vois qu’un vulgaire film en plastique. Dégoûté en gros.
Quelques jours plus tard, j’essaie d’en refaire, et toujours pareil, un film de plastique transparent qui rend aucune image. Et puis, je commence à lire quelques astuces sur le Net qui disent que souvent il faut un peu d’entraînement et surtout la bonne lumière blanche pour voir un hologramme par réflexion. Alors, je me met sous un spot halogène, avec le côté photosensible face à moi et je commence à incliner le film pour arriver au même angle qui a servi pour créer l’hologramme, et là, surprise ! Je vois mon hologramme ! Ca donne une image qui va du rouge, à l’orange (j’ai même quelques hologrammes qui rendent une image verte, va savoir comment), qui se « déplace » sur la totalité du film en fonction de l’angle. Après un peu d’entraînement, on voit assez rapidement.
En résumé : c’est pas forcément parce qu’on ne voit rien au premier regard que l’hologramme est loupé.
Quelques astuces avant de passer au schéma :[ul]
[li] Prendre un objet brillant et solide et le placer très proche de la plaque pour obtenir une image nette[/li][li] Prendre un objet plus petit que la taille de la plaque[/li][li] Une fois que tout est en place (dans le noir donc), quitter la pièce quelques minutes (sans allumer la lumière !) pour laisser le matériel se stabiliser[/li][/ul]Niveau schéma ça donne ça :
Et en vrai :
Hologramme par transmission
C’est l’autre grand type de hologramme qui a l’avantage de produire des images tout à fait saisissantes et incroyablement nettes avec une excellente profondeur 3D, par contre, il est nécessaire de visualiser les hologrammes par transmission avec une lumière LASER.
Techniquement, le montage est sensiblement le même que pour réaliser un hologramme par réflexion, seul l’emplacement de l’objet change : ici, il est du même côté de la plaque que la lumière directe.
Quelques remarques :[ul]
[li] On peut prendre un objet plus grand que la plaque[/li][li] Il faut éviter que l’ombre de l’objet tombe sur la plaque[/li][/ul]Exemple de mise en place :
En vrai (il n’y a pas de film dans le support) :
Pour voir un hologramme par transmission, il faut utiliser un montage semblable à celui qui a servi à exposer le film :
Il est impossible de reproduire sur une photo classique (en 2D) l’image rendue par un hologramme, mais juste pour donner une idée, les deux images suivantes sont du même hologramme, mais à des angles de vue différents. Le résultat en photo est assez moyen, mais en vrai c’est tout à fait saisissant : on arrive à un angle de vue de genre 45°, c’est-à-dire qu’on arrive à faire « tourner » l’objet dans l’espace et à voir des reflets différents selon la position.
Et puis quoi maintenant ?
J’espère que cet article vous aura plu. Sans vouloir essayer de convertir tout le monde en amateur (on peut rêver ), il s’agissait de présenter cet Art assez méconnu qu’est l’holographie.
S’il y a des gens qui trouvent ça intéressant, n’hésitez pas à poser des questions ou à faire des remarques.
Fournisseurs
Evidemment, le matos nécessaire est très difficilement trouvable en France, donc vous allez recevoir plein de colis UPS/USPS B)[ul]
[li] Integraf : kits, plaques/films, produits chimiques[/li][li] Edmund Optics : matos optique : lentilles, miroirs, etc[/li][li] eBay : lasers, diverses choses[/li][li] Castorama/Mr Bricolage/insert magasin bricolage ici : bacs de peinture, plaques acier, aimants, colle, ainsi de suite[/li][/ul]
[edit] phôtes d’autograf