Dans une indifférence quasi générale, Futuremark, autrefois adulé pour ses démos techniques avant-gardistes et ses benchs pointus, vient de rendre disponible la version 2005 de son célèbre 3DMark. La version 2003 avait été au cœur d’une polémique sans fin et avait ouvert le bal des « optimisations » désormais monnaie courante. Faut-il pour autant rejeter ce nouvel opus ?
Il faut dire que Futuremark n’avait pas fait grand chose pour se réconcilier avec ses détracteurs. Vous vous souvenez certainement de « l’affaire 3D Mark 2003 ». Un rappel des faits pour ceux qui auraient la mémoire courte. Peu avant la sortie du dit bench, nVidia avait claqué la porte du programme de développement, mécontent du traitement réservé à ses cartes. Les premiers scores n’étaient en effet pas glorieux pour la gamme FX du constructeur, déjà décriée à l’époque après le revers de la 5800 et la découverte par un grand monsieur du fait que les cartes ne disposaient que de quatre pipelines contre les huit annoncés. Pour ressortir la tête de l’eau, nVidia s’est lancé dans une vague d’optimisations à tout va. Remplacements de shaders, réduction de la charge de travail et autres subtilités avaient permis à la firme au caméléon de revenir dans la course aux performances. nVidia invoquait un « travail » sur ses drivers jusqu’au jour où ExtremeTech (bien aidé par Futuremark) avait découvert le subterfuge. S’en est suivi une longue polémique sur l’intérêt des optimisations, le célèbre fabriquant arguant que son but était d’offrir la meilleure expérience possible aux joueurs disposant du hardware de la firme. En continuant à attirer des clients, bien entendu.
Ceux qui lisent le magazine officiel des loutres le savent : la gamme FX n’était pas à l’aise pour faire tourner les Pixels Shaders, une chose qu’on aura pu vérifier récemment avec la sortie de Far Cry ou de la version beta de CS : Source.
Futuremark avait alors joué les chevaliers blancs dénonçant les viles tricheries, espérant s’attirer la sympathie des joueurs. C’était sans compter sur le fanatisme de certains « nVidiots » (ils s’appellent comme ça eux même, sisi) qui y voyaient un pro ATIsme. Forcément. Mais dans ce monde de capitalistes, les grands principes ne tiennent pas longtemps. nVidia à accepté de participer de nouveau au programme de développement de Futuremark, signant en même temps un gros chèque, et, de son côté, le développeur a de nouveau validé les pilotes qui, jusque là, étaient considérés comme impies. Tout cela ne laissait pas présager du meilleur pour la version 2005.
Et pourtant, quelques choix drastiques de conception ont permis de recadrer la nouvelle version. Tout d’abord, et ca va énerver les possesseurs de GeForce 4 MX (forts nombreux à en croire le résultat du sondage Half Life 2) : seules les cartes supportant au minimum les shader model 2.0 sont supportées. C’est cohérent pour les jeux à venir, même si ça fait grincer quelques dents. Et fini les shaders fixes que l’on remplaçait à coups de drivers par des versions optimisées, 3D Mark 2005 utilise le langage de description de shaders de haut niveau de Microsoft. Le compilateur intégré à DirectX triture ce code à la volée afin de l’optimiser pour un « profil » donné. Les fameux 2.0, 2.0a et 2.0b qui ont tant fait parler d’eux à la sortie du patch 1.2 de Far Cry. Etant donné que les jeux récents (Far Cry) et à venir (Half Life 2) utiliseront tous ce principe, le choix de Futuremark est judicieux. Cela limite d’autant les possibilités de tricherie, même si des permutations de shaders sont toujours possibles (bien que plus complexes et plus visibles) au niveau des drivers.
Certains choix sont par contre plus contestables. La scène de nature (le marronnier des 3D Mark) n’utilise pas par exemple le Geometry Instancing sur les cartes le supportant. Interrogé sur le sujet par Hardware.fr, le développeur justifie ce choix par le fait que leur contact technique chez nVidia leur a déconseillé ce choix, la scène s’adaptant mal. Non, je ne vais pas relancer une polémique. On notera également que l’influence du processeur est assez forte sur le résultat final, ce qui n’est pas forcément très représentatif des jeux actuels. Et les jeux à venir ? J’appelle la ligne de Madame Soleil, ne bougez pas…
3D Mark 2005 est également l’occasion pour nVidia de montrer tout l’intérêt du Shader Model 3.0 qui différencie la gamme 6800 des cartes ATI. En pratique, deux des jeux utilisent les fameux branchements pour simplifier le calcul. L’écart de performances entre les versions 2.0 et 3.0 est mince, prouvant ce dont on se doutait déjà : les branchements sont très coûteux sur la dernière architecture de l’américain et seuls des shaders très longs et très précis peuvent en tirer un bénéfice réel. Ce n’est pas le cas de 3D Mark 2005.
Ce bench est il valable pour mesurer les performances ? Doit-on avoir peur des optimisations ? Depuis vendredi dernier, date de mise à disposition du bench à la presse, les deux compères ont fourbi leurs drivers pour maximiser leurs performances. ATI a d’ailleurs assez ironiquement mis à disposition son dernier pilote (8.07 soit 4.11) prétextant qu’il corrigeait des plantages lors des écrans de chargement de Star Wars : KOTOR. C’est gentil les gars, mais j’ai déjà fini le jeu il y’a belles lurette. La véritable raison était bien entendu de donner aux joueurs le dernier driver pour que tourne au mieux les cartes canadiennes sous le bench. Le ridicule ne tue pas, apparemment.
nVidia a également mis à la disposition de la presse deux drivers améliorant les performances d’environ 20% selon les cartes. Résultat l’écart avant et après les drivers est à peu près constant. D’où sortent ces gains faramineux ? Difficile à dire, et l’on attend de voir s’il y’en aura d’autres pour pouvoir juger réellement de l’intérêt du bench.
Alors en attendant, on peut toujours admirer les scènes de jeux assez impressionnantes graphiquement, quitte à baisser la résolution pour ceux qui n’ont pas des configs de nantis. Et rassurez-vous, ce n’est pas beaucoup plus fluide avec des cartes graphiques très haut de gamme. La démo est par contre très réussie et même si vous ne croyez plus aux vertus des 3D Mark, téléchargez-le juste pour le plaisir des yeux.
Un dernier mot sur les limitations de la version gratuite. Vous serez tout d’abord gratifié d’une publicité pour Alienware, le constructeur de machines qui coûtent trop cher. Les tests théoriques seront inaccessibles (ils ne rentrent pas en compte dans l’élaboration du score), et un « nag screen » vous demandera de vous enregistrer, avec un compteur qui s’incrémente d’une seconde à chaque lancement du bench. Bien bien lourd, mais allez regarder la démo quand même.
Le site officiel de 3D Mark pour le téléchargement :
(ndyav : un grand merci à brooks_fr pour une news portant sur le même sujet)