Ouh là, une news qui ne parle pas d’Apple ? Je sais, ça fait désordre. Ce sont mes toujours très bien informés collègues du Parisien (le journal en papier, oui) qui l’annoncent : la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (en clair, la DGCCRF, mais l’usage veut que l’on donne toujours la définition des sigles lorsqu’on les utilise pour la première fois) a lancé le 25 aout 2006 (ça aussi c’est une recette magique de la presse, plutôt que de dire « hier », on donne les dates en entier, pour que vous puissiez relire l’actualité plus tard) une enquête sur les comparateurs de prix (généralement on met beaucoup moins de parenthèses, aussi). Information confirmée le jour même par la DGCCRF qui corrobore l’article susnommé dans un communiqué de presse que l’on retrouve sur leur site web.
Et comme 99% des lecteurs ne cliquent pas sur les liens, je me sens obligé de vous en livrer un extrait du dit communiqué :
Note : Les amoureux du français cliqueront rapidement sur le lien. Vous y trouverez le numéro de téléphone du contact presse de la DGCCRF, indispensable pour vous offusquer sur son placement malencontreux d’une virgule après le « C’est pourquoi ». Elle casse sans raison le rythme de lecture. [/i]
Stupeur ! Déloyaux les comparateurs de prix ? La question de leur transparence est en effet au cœur de tous les débats. Mais pour bien le comprendre, il faut revenir à leur mode de fonctionnement. Nos confrères du Monde indiquent dans cet article que pour pouvoir figurer sur des comparateurs, les sites de ventes en ligne doivent généralement payer. Sans remettre en cause leurs dires, de ce que nous avons pu constater, la situation est légèrement plus complexe (ou sournoise, au choix).
Au commencement, les comparateurs de prix acceptaient gratuitement et sans contrainte de référencer les sites marchands. De là, plusieurs business model sont nés, on peut soit vous facturer les clics effectués (les clients envoyés chez vous) ou vous soutirez une petite commission sur les ventes effectuées (qu’elles soient faites automatiquement ou dans une durée déterminée, blame it on the cookie). La vente en ligne était une curiosité et les euh-magasins rares. Son explosion (celle de la vente en ligne, oubliez deux secondes les batteries manufacturées par Sony) a forcément attiré les convoitises et le « métier » a évolué comme le dit si bien l’autre (ne cherchez pas, vous ne le connaissez pas).
Car si en règle générale le référencement est gratuit (il peut être soumis à des conditions strictes sur la taille de l’entreprise ou d’autres critères plus ou moins objectifs), vous n’avez droit qu’a l’offre de base. Car c’est un peu comme l’achat d’une voiture, vous avez droit à une plâtrée d’options. Et là, c’est le drame.
Qui dit « option » (partenariat, etc…) dit favoritisme et donc comparaison biaisée. Et fatalement, cela ne plait pas à notre chère commission : on ne peut pas être juge et partie. D’autant que le climat n’est pas exactement propice à la publicité comparative sur le net. Vous vous souvenez peut être du lancement en mai 2006 du site quiestlemoinscher.com censé comparer les prix d’une série de produits de grande consommation chez des enseignes de la grande distribution (voir cet article du figaro). Seul hic, il appartenait au groupe Leclerc et la justice à décidé qu’ils n’étaient pas « un observateur objectif » et donc ne pouvait pas être « neutre ». Le site à donc été fermé au bout d’une quinzaine de jours (du coup, impossible de le trouver sur archive.org). Histoire d’être neutre à mon tour, un lien sur le blog de Michel-Edouard Leclerc qui expose son point de vue.
Et comme vous ne cliquez jamais mes liens, encore une fois un petit extrait de son opinion qui colle, en prime, parfaitement à notre débat :
Dans le mille, Emile (enfin Michel Edouard) ! Pour illustrer un peu le sujet, j’ai été faire un petit tour sur ces différents sites pour voir ce qui pourrait déranger la DGCCRF. Bien entendu, il ne s’agit ici que de mes propres constatations, il ne s’agit en rien de juger de l’honnêteté des comparateurs, de leurs éventuels référencements payants ou d’effectuer une quelconque comparaison entre les offres. C’est le travail de la commission, chacun le sien. Notez enfin que les noms des comparateurs ont été cachés lorsque c’était possible sur les captures d’écrans. Les remarques ne constituent en rien une liste exhaustive ou un jugement de valeur pour un site donné.
Sur la quasi-totalité des comparateurs, il est possible de trier les offres en fonction d’une série de catégories, la plus importante étant le prix (produit, et produit + livraison). Certains sites sont cependant parfois mis en avant dans des « vues par défaut », c’est-à-dire la page sur laquelle l’on tombe avant d’appliquer un tri. Certains sites disposent parfois d’un logo et d’autres non.
[center]
En tête de gondole, les sites qui disposent d’un logo, sans ordre de prix. Les autres sites sont classés par leur prix TTC (sans la livraison).[/center]
La taille des descriptions pour un même produit peut également varier d’un site à l’autre. Certains se contentent d’inclure le nom, d’autres ajoutent un message commercial. La couleur et la fonte de ceux-ci peuvent changer. Certains sites de vente utilisent ils mieux le système que d’autres ?
Des choses aussi simples que la disponibilité peuvent aussi être exploitées que ce soit par les marchands en lignes ou les comparateurs.
[center]
Changement de couleur pour indiquer un « code promo » et tailles de descriptions variables. [/center]
Des choses aussi simples que la disponibilité peuvent aussi être exploitées que ce soit par les marchands en lignes ou les comparateurs.
[center]
Dans cet exemple, plusieurs graphies différentes pour indiquer la présence en stock. Un texte plus long permet d’agrandir sa « ligne » et donc sa visibilité.[/center]
La présence de code de réductions pose également un problème. Est-ce une offre réservée à ceux qui passent par ce comparateur de prix ? Sa présence est elle liée à un partenariat ?
[center]
Logos, messages commerciaux et bons de réductions, difficile de faire le tri dans les « abus » du système par les sites de vente et les offres payantes des comparateurs.[/center]
On ne sait généralement pas grand chose de la périodicité des référencements et des mises à jour par les sites. Certains sites essayent cependant d’offrir quelques précisions.
[center]
La nature des accords commerciaux sera très certainement le point sur lequel la DGCCRF demandera des efforts de transparence. [/center]
Les comparateurs de prix peuvent également vivre de publicités présentes sur leurs pages. Mais quid de la publicité d’un site « comparé » en simultanée ?
[center]
Et quid des publicités qui coïncident avec le produit que l’on souhaite acheter ? [/center]
Certains sites indiquent cependant plus clairement que d’autres leurs partenariats commerciaux.
[center]
Pourrait-on voir se généraliser ce genre de choses ?[/center]
Il ne s’agit encore une fois que de simples constatations et l’on ne fait que toucher la face visible de l’iceberg. Quid des services dédiés aux vendeurs ? Des outils pour leur indiquer leur position par rapport à leurs concurrents, des statistiques sur les pages plus visitées ou d’avertissement lors d’une mise à jour d’un prix ? Cette face cachée de l’iceberg doit elle aussi être considérée lorsqu’elle est facturée.
Vous le voyez, le sujet est on ne peut plus complexe et le cadre légal de ces comparateurs de prix est encore plus complexe à définir. Les lois de la publicité comparative s’appliquent-elles ? A quel niveau et à qui (aux marchands, aux comparateurs ?) ? Et quid d’une éventuelle neutralité ? Qui peut la garantir ? Les initiatives commerciales sont elles possibles ou doit on les réserver aux associations de consommateurs ? Et quid des liens entre les sites d’actualité et les comparateurs de prix ? Je pose trop de question ? Ha, et ma news est trop longue aussi ? Bon, je vous laisse alors.
Sources :
Le parisien (qui a sorti l’info, consultation payante)
Le monde (résumé, avec l’AFP)