Je vais essayer d’apporter quelques éléments de réponses à partir du prisme du peu que je sais : l’augmentation des lits de soins critiques (donc principalement réa, mais aussi soins intensifs et USC les unités de soins continus) entre mars et avril dans l’une des régions concernées par les premiers clusters.
La principale problématique n’était pas forcément les moyens humains. La déprogrammation en chirurgie exigée, non sans mal, aux établissements devaient limiter le risque d’ajouter de nouveaux patients réa post-op…mais a aussi permis de libérer des anesthésistes réanimateurs et des infirmiers (la problématique était plus de s’assurer qu’ils se sentaient capables de retourner en réa après n’y avoir pas mis les pieds depuis des années…avec les risques que cela implique en perte de chances pour les patients pris en charge par eux).
La principale problématique a été le matériel (respirateurs puis consommables pour ces équipements).
Du matériel fut prêtés ou empruntés. Mais c’était insuffisant. Les fonds financiers ont tardé ou ont été bloqués à je ne sais quel niveau mais les constructeurs ont finalement prêtés ou vendus à d’autres pays qui ont plus facilement tiré le carnet de chèques.
Une autre problématique, qui là a été vraiment non anticipée, fut le suivi et l’approvisionnement pour certains médicaments nécessaires à la réa, du genre curare.
Ayant changé d’emploi cet été, je n’ai plus accès au même niveau d’informations. Mais ce qui est demandé aux établissements, là en ce moment, c’est de déprogrammer autant que possible les interventions chirurgicales et médicales, tout en maintenant prioritairement les patients avec cancer, ou en lien avec une greffe, ou une maladie chronique, ou liés aux urgences, ou encore concernés par la santé mentale. Les lits libérées pourront être transformés en soins intensif ou USC…et que des lits de soins critiques soient transformés en lits de réa. Ainsi que libérer des professionnels pour renforcer ces créations temporaires de lits de réa.
Sur la question de fermeture de lits, je ne me positionnerai pas sur les établissements cités dans l’article du lien, car je ne connais pas ces établissements et leur situation. Mais il ne faut pas oublier la couche politique, corporatiste ou syndicaliste. La fermeture de lits n’est pas quelque chose qui se fait du jour au lendemain, et elle ne doit pas être strictement et systématiquement interprétée comme une diminution de coûts en défaveur de la population. Je donne un exemple : une unité de X lits, par exemple en hospitalisation complète de psychiatrie générale, dont l’occupation des lits ne monte jamais au delà de 40% depuis plus de cinq ans. Devant ce constat, et le constat qu’il n’existe pas, sur ce même secteur psychiatrique, de places en hospitalisation de jour, ni d’un CMP pour effectuer des consultations à proximité de la population concernée (et donc que certains patients sont hospitalisés parce qu’il n’y a pas d’alternatives possibles)… Il est décidé de créer N places en hospitalisation de jour, de créer un CMP (c’est une sorte de cabinet public pour effectuer les consultations), de fermer 60% à 50% des lits d’hospitalisation complète, avec un redéploiement des équipes pour correspondre à l’activité de ces 3 prises en charge. Au final, le discours de certains se limitera à « on a fermé 50% à 60% de la capacité d’hospitalisation de cet hôpital public ».
(et je ne parle volontairement pas de la fermeture de maternités, car on rajoute des éléments éthiques et de sécurité qui complexifient les discours).
…Tout cela pour dire que ce sont 2 sujets bien distincts : le discours de création de lits de réa pour répondre au pic du covid-19 & le discours que des lits d’hôpitaux continuent à être fermés. On ne parle pas de la même chose, et avec une temporalité bien différente.
NB : je ne sais pas si il y a des sites, ou des recherches de journalistes, à ce sujet. Mais les données (lits ouverts, occupations, nb de personnel, etc…) sont disponibles (mais en brut donc faut chercher par établissement, avec une fiche différente par année) sur le site des SAE : https://www.sae-diffusion.sante.gouv.fr/sae-diffusion/accueil.htm
(il y a un biais possible : c’est basé sur du déclaratif : ce sont les données déclarées par la direction de chaque établissement, chaque année)